M. De Maistre nous semble avoir expliqué qu’imparfaitement et à demi l’infaillibilité, sous le point de vue théologique. « L’infaillibilité dans l’ordre spirituel et la souveraineté dans l’ordre temporel sont, dit-il (1), deux mots parfaitement synonymes ; l’un et l’autre expliquent cette haute puissance qui les domine toutes, dont toutes les autres dérivent, qui gouvernent et n’est point gouvernée, qui juge et n’est point jugée.»
Cette prétendue synonymie, cette identité n’est pas réelle. L’infaillibilité est plus que l’absolutisme, que la puissance suprême, qui ne connait point ici bas de supérieurs. Cette indépendance, ce droit de commander en maître, de juger sans contrôle et en dernier ressort, entrent sans doute dans l’infaillibilité ; mais ce n’est pas là précisément ce qui la constitue.
L’infaillibilité est la faculté, soit intrinsèque et essentielle comme dans Dieu, soit de privilège comme dans l’Eglise, de ne pouvoir errer. Le droit d’imposer une décision en découle, mais il en est distinct, comme une conséquence de son principe. La souveraineté tire sa force de l’infaillibilité ; toute puissance qui n’est pas infaillible, n’est pas absolue; car ses arrêts, de fait ici-bas irréformables, sont sujets, s’ils sont iniques et faux, à être annulés ou par un législateur plus éclairé, ou par la vérité qui juge au ciel. Au contraire, la puissance infaillible n’est en aucune manière subalterne et subordonnée; elle se confond avec l’autorité de Dieu, avec sa véracité qui prononce par un organe humain.